«Vainement on chercherait dans Paris une rue plus paisible que la rue Saint-Gilles, au Marais, à deux pas de la place Royale.
Là, pas de voitures, jamais de foule. A peine le silence y est rompu par les sonneries réglementaires de la caserne des Minimes, par les cloches de l'église Saint-Louis ou par les clameurs joyeuses des élèves de l'institution Massin à l'heure des récréations.
Le soir, bien avant dix heures, et quand le boulevard Beaumarchais est encore plein de vie, de mouvement et de bruit, tout se ferme. Une à une s'éteignent les grandes fenêtres à tout petits carreaux. Et si, passé minuit, quelque bourgeois regagne son logis, il hâte le pas, inquiet de la solitude et préoccupé des reproches de son concierge qui lui demandera d'où il peut bien revenir si tard.
En une telle rue, tout le monde se connaît, les maisons n'ont pas de mystère, les familles pas de secrets.
C'est la petite ville, où l'oisiveté curieuse a toujours un coin de son rideau sournoisement relevé, où les cancans poussent aussi dru que l'herbe entre les pavés.
Aussi, le 27 avril 1872, un samedi, dans l'après-midi, remarqua-t-on rue Saint-Gilles, un fait qui partout ailleurs eût passé inaperçu.
»
|